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vendredi 21 août 2009

TALIBÉS- LES ENFANTS DE DIEU

Extraits de Tanimoune Tribune journal des lycéens de Tillabéri reproduits avec l'aimable autorisation de Monsieur Issa Hassane, censeur, responsable de la publication

Avant que, par la colonisation, ne vienne chez nous, l’école étrangère classique, on avait une ancienne école conçue pour vulgariser l’Islam sur le continent : l’école coranique. Elle avait alors fonctionné tant bien que mal et dans ce parcours, on remarquera et déplorera une évolution négative de cette école.
Instrument de formation et d’éducation des enfants, l’école coranique jouait, jadis, un rôle strictement religieux. L’enfant apprenait la parole de Dieu et corrélativement un certain savoir-être et un certain savoir-vivre. Les marabouts étaient alors des érudits pour qui l’enseignement coranique était l’essence de leur vie. Ils servaient Dieu, la religion et leur société en transmettant aux enfants la sagesse et la foi qui doivent déterminer le comportement futur de l’homme dans son milieu. On le voit d’ailleurs chez C. Hamidou Kane dans l’aventure ambiguë. En effet la sévérité du maître Thierno en face de son disciple Samba Diallo n’est que l’expression d’une rigueur par laquelle l’homme veut réussir à construire une élite religieuse.

Aujourd’hui, hélas, nous ne pouvons que remarquer dans certains milieux une dérive de cette école qui continue, en cette ère de troisième millénaire, d’évoluer dans l’informel. Cette situation gravissime n’a pas empêché des parents de préférer cette école à celle dite occidentale ou étrangère (toutes les deux ne sont-elles pas des écoles étrangères ?). Pourtant, au lieu de leur revenir formés et sages, le plus souvent, bon nombre de garçons deviennent abrutis, plus aptes à rentrer dans la pègre que dans la société civilisée. C’est dire que cette école ancienne, dans les conditions actuelles de sa gestion, est condamnable et que des réformes s'imposent.
Il est de notoriété publique que l’école coranique formalise presque l’exploitation des enfants. Ce n’est plus leur instruction qui est prioritaire chez beaucoup de marabouts. On voit leurs élèves qui, mal fagotés, défient le froid, ou pieds nus affrontent la canicule et la terre ardente de mai, pour chercher, une vielle tasse à la main, leur pitance au milieu de ces « Armadjirbaras » plaintifs.

C’est une vie difficile et, à voir les conditions précaires dans lesquelles ces enfants évoluent, il va sans dire que certains parents renoncent à y envoyer leurs progénitures. Pour apprendre et pour aimer Dieu, a-t-on besoin de souffrir ? Pis, quand on voit la qualité de la nourriture qu’ils gagnent et qu’ils mangent, un mélange de tout et de rien, on est en droit de craindre pour leur santé. Ce sont des grands pèlerins de la faim qui, dans leur voyage pédestre, souvent du Mali au Niger, passent de village en village pour aller chercher le savoir (?).
Pauvres petits garçons frêles aux pieds fragiles ! Ils sont envoyés par les parents pour chercher le savoir et ils voyagent ! C’est l’exemple de cet enfant qui nous dit qu’il vient du Mali avec son marabout Mohamed pour la première fois à Tillabéri. Un autre nous confie qu’il vient de Fandou (Damana) et qu’il était venu déjà, d’autres fois, à Tillabéri. Ils précisent qu’ils y restent jusqu’à l’approche de la saison des pluies pour retourner dans leur village cultiver la terre (en fait les champs du marabout !). Ils ajoutent également que certains de leurs condisciples leur arrachent les sous que leur donnent leurs parents, les repas qu’on leur donne, d’autres les frappent. Certains prennent de la dissolution pour se droguer. Souvent ces derniers, indiquent-ils, ne dorment pas avec eux, ils sont dans la rue ou dans les gares.


La vie des talibés est un enfer. Nous trouvons dommage que cette école de Dieu vienne légaliser la mendicité, alors que la religion elle-même au nom de laquelle elle se fait, l'a proscrit. Il arrive que ces enfants qui font pitié deviennent encombrants pour la société. Ils passent tous en file indienne à la porte de toutes les maisons avec des phrases du Coran pour toucher notre pitié et nous arracher un peu de notre repas. Pour nous il est évident qu’une société ne peut pas évoluer avec de tels comportements.
Nous avons interrogé un marabout qui, vraisemblablement n’a pas voulu nous « ouvrir son cœur ». Il s’est contenté de nous dire vaguement qu’il n’a aucun problème pour le moment. Et comme pour se racheter, nous a dit qu’il y avait quelques années, des talibés qui dormaient dans la rue l'avaient quitté sans l’informer. La fumée, c’est le signe du feu. Les enfants ne peuvent pas l'avoir abandonné sans raison.
Par contre, ce que nous savons par nos investigations et qu’on ne peut pas courageusement nous dire, c’est que ces enfants sont exploités par certains maîtres. Ils travaillent et mendient au profit de ceux-ci. Il semble d’ailleurs qu’à Tillabéri pour travailler facilement et à moindre frais votre parcelle de riz, il vous suffit de donner une certaine somme au marabout qui enverra ses talibés dans votre champ. Ce sont eux qui travaillent, c’est l’autre qui en tire profit ! Vive la vie !

ENRACINER LA DÉMOCRATIE

Que de chemin parcouru en un peu plus de 20 ans !
La commune de Tillabéri n'existait juridiquement pas en 1986 lorsque l'association "Collectif Tiers Monde" de Juvisy, devenue en 1987 l’Association Juvisy-Tillabéri, décidait de participer à la création de 15 puits destinés à permettre des cultures maraîchères pendant la saison sèche.

Mi 1988, dans le cadre d'une nouvelle organisation administrative du Niger, Tillabéri devient Préfecture de l'ancien département de Niamey (à l'exclusion de la ville de Niamey) et la commune urbaine de Tillabéri est juridiquement créée avec un modeste budget en propre. Elle sera administrée pendant 16 ans par des "administrateurs délégués" successifs désignés par l'Etat. Des services propres à la commune se mettent progressivement en place: état civil, cadastre, assainissement, etc.

Juillet 2004. Un Conseil Municipal est élu démocratiquement pour gérer une commune urbaine dont le territoire passe de 52 à 452 km² et la population de 25.000 à environ 48.000 habitants. Mr. Mourou Kaboyé devient le premier maire élu de Tillabéri en septembre 2004.

Dès 1991, l'un des domaines prioritaires de notre coopération à Tillabéri sera l'appui aux services municipaux, pour tenter de résoudre les problèmes d'hygiène et d'assainissement (déchets ménagers, création de 500 puisards pour les eaux usées et de quelques 150 latrines avec la participation financière et physique de la population concernée), renforcer l’équipement matériel de la mairie, améliorer l'accès à l'eau potable, progressivement créer une bibliothèque.

A partir de début 2005, en plein accord avec le conseil nouvellement élu, cette priorité est confirmée. Notre première responsabilité de partenaire est de renforcer les moyens de la commune de Tillabéri:
- en offrant des formations tant aux nouveaux élus qu'à des cadres communaux
- en apportant notre appui à l'élaboration participative d'un plan de développement communal à 3 ans approuvé par le Conseil Municipal début 2006
- en équipant la commune d'un premier véhicule 4x4 et de divers autres matériels essentiels (informatique, photocopie)
- en participant au recrutement d'un agent en charge de l'assainissement
- en recherchant de nouveaux financements pour permettre un véritable accès à l'eau potable de toute la population
- en effectuant des études pour améliorer l'efficacité des services et définir des plans d'action dans le domaine de l'eau ou de l'évacuation des eaux usées.


Ci-dessus la mairie de Tillabéri

Pour 48.000 habitants, les services municipaux comprennent au total 28 agents. Une douzaine d'agents de l'Etat continue à apporter un appui conseil à la commune dans les domaines les plus divers: planification, agriculture, élevage, éducation, culture, etc.
Le budget de fonctionnement de la commune représente 2€ par habitant et par an et celui d'investissement hors subvention de l'ordre de 0,4€.

En 2008, l'appui financier de Juvisy et de ses partenaires s'élèvera à 45.000 euros pour l'appui institutionnel et aux services de la Mairie (à l'exclusion de l'eau et de l'éducation).

La population qui a élu son conseil attend de lui des résultats concrets pour l’amélioration de sa vie quotidienne. L’enracinement de la démocratie suppose que les élus fassent la preuve de leur efficacité malgré la très grande faiblesse de leurs moyens. A nous de les aider à relever ce défi.

L'ENVIRONNEMENT : LE DÉFI DE LA DÈSERTIFICATION

Des étendues arides aux couleurs ocres parsemées de touffes d'acacias, un épais ruban de verdure, le territoire de la commune de Tillabéri a le charme envoûtant des paysages sahéliens mais, comme partout dans cette région, depuis plusieurs décennies, la désertification progresse inexorablement.
Les saisons sèches (d'octobre à mai ) s'allongent, les saisons humides sont de plus en plus souvent interrompues pas des phases de sécheresse qui détruisent les récoltes de mil.
54300 habitants appartenant à différentes ethnies : Zarma (les plus nombreux), Peuls, Bellas, Haoussas, … presque tous musulmans, se répartissent en un centre urbain et plusieurs villages sur 450 km² (Juvisy =2,3 km²). Le centre ville (17000 habitants ), sur la rive gauche du fleuve, rassemble fonctionnaires (la ville est capitale régionale), commerçants et artisans. Les habitants des villages situés dans les îles vivent de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche, ceux de l'intérieur des terres, de la culture du mil en saison humide.
Les revenus très faibles de ces activités mettent l'immense majorité de la population au dessous du seuil de pauvreté de deux dollars par personne et par jour.
C'est par le développement de l'irrigation que l'ont peut faire face aux irrégularités du climat et tenter d'améliorer les revenus. Cultures maraîchères et surtout périmètres rizicoles apportent des compléments essentiels pour la survie et le maintien des paysans tentés par l'émigration vers des villes où aucune infrastructure et aucun emploi ne peuvent leur être proposés.


Le réchauffement climatique sera, les scientifiques nous l'annoncent, particulièrement destructeur pour les pays de l'Afrique sahélienne. Comment rester insensibles devant les difficultés de ses hommes et de ces femmes engagés dans la lutte contre la désertification.